Dans cette affaire, l’AMF se saisit d’une variation anormale du cours de clôture de fin d’année de deux valeurs du compartiment B du marché NYSE Euronext Paris et démontre la volonté d’une société de gestion de manipuler le cours…… de ces valeurs pour améliorer la performance annuelle d’un OPCVM investi sur ces titres.
Elle sanctionne donc lourdement la société de gestion à l’origine de la manipulation de cours et le prestataire chargé de son exécution, ainsi que les trois personnes physiques impliquées : le gérant du fonds à l’origine des deux ordres incriminés, le sales-trader de cette même société qui les a transmis à la société de bourse et le sales-trader de celle-ci, qui les a exécuté sur le marché.
En ce qui concerne les manquements aux obligations professionnelles de la société de gestion, celle-ci se voit reprocher ‘‘de n’avoir pas mis en œuvre effectivement des modes de fonctionnement de nature à prévenir et détecter les manquements professionnels de ces préposés’’. En particulier, le sales-trader ayant transmis l’ordre aurait dû refuser la transaction, et alerter sa hiérarchie ou le responsable de la conformité.
En ce qui concerne la société de bourse, celle-ci se voit reprocher de ne pas avoir établi, au moment des faits, de dispositif permettant d’identifier – a priori – les opérations pouvant constituer un abus de marché pour des montants inférieurs à 5 millions d’euros. Un système a posteriori existait bien par ailleurs, mais celui-ci ne tenait pas compte de certains critères tels :
le volume de l’ordre par rapport au volume moyen des titres échangés sur la valeur ;
le volume de l’ordre par rapport au volume des ordres présents sur le carnet d’ordre de la valeur ;
l’écart entre le cours demandé et le dernier cours coté ou entre le cours demandé et le cours théorique de clôture etc.
En ce qui concerne la troisième personne impliquée, elle aurait dû légitimement refuser d’exécuter l’ordre sur le marché, et alerter sa hiérarchie ou le responsable de la conformité.
La morale de cette histoire ?
La détection des manipulations de marché et des situations d’abus de marché n’est jamais évidente.
Toutefois, le cas tel que décrit ici – de manière très pédagogique – met en évidence certaines caractéristiques troublantes de la manipulation de cours qui doivent alerter les responsables de la conformité … bien avant que le secrétaire général de l’AMF ne décide de mener l’enquête :
opérations sur des valeurs cotées de taille petite ou moyenne, avec des volumes moyens traités généralement faibles,
ordres de taille significative par rapport aux volumes traités habituellement,
changements dans les caractéristiques de l’ordre (ici, ‘‘au marché’’ puis avec une limite, pour éviter la ‘‘réservation’’ du cours),
ordres sur carnets d’ordres très faibles, propices aux variations de cours importantes,
ordres émis à un horaire proche de la clôture, qui plus est en fin d’année, dans des marchés particulièrement ‘‘creux’’,
etc.
Pour en savoir plus :
20/04/2015 : Décision de la Commission des sanctions du 16 avril 2015 à l’égard de MM. Gilles Renaut, Alexander Roose, Amaury Steyaert et des sociétes Exane SA et Petercam SA]]>