Où il est question d’informations ‘‘imprécises et lacunaires’’ … et de clients satisfaits !
Dans une sanction de mai 2015 à l’encontre d’un conseiller en investissements financiers, l’AMF nous rappelle l’importance d’une formalisation impeccable du conseil donné au client, en particulier dans les termes utilisés dans le rapport écrit de conseil.
Le contexte et les produits
Le contexte est celui d’un CIF (conseiller en investissements financiers) à l’activité et au CA non négligeables, proposant à des clients, entre autres, des investissements dans le cadre de placements privés : 1) dans des actions d’une société par actions simplifiée d’une part (cadre réglementaire du conseil en investissements financiers), 2) dans des parts sociales d’une société en commandite simple d’autre part (cadre réglementaire du conseil en gestion de patrimoine).
Dans les deux cas, les produits offraient (ou semblaient offrir) un rendement financier net garanti appréciable, une certaine liquidité (via des engagements de rachat des actions ou des parts sociales), des sous-jacents solides (acquisition d’un actif immobilier mis en location dans un cas, exploitation de points de vente dans l’autre) etc.
Une information inexacte et trompeuse, imprécise et lacunaire
Nonobstant la nature juridique des deux placements en cause, notons simplement que leur présentation aux clients n’a pas satisfait l’AMF. Dans les deux cas, les termes ou les comparaisons utilisés (‘‘placement de nature sécuritaire’’, assimilation des produits à des parts de SCPI ou des obligations, ‘‘valeur nominale garantie à tout moment’’, assurance d’un rendement ‘‘garanti’’) ont été jugés inexacts et trompeurs.
De même, selon l’AMF, la présentation des deux produits était également incomplète sur les risques de liquidité et de perte en capital et la nature et le mécanisme des engagements de rachats des titres. Manquait aussi l’information sur la société garante elle-même, par exemple.
Le conseiller, simple relais de l’information promotionnelle du fournisseur ?
L’AMF balaie l’argument. L’obligation d’adresser à ses clients des informations exactes, claires et non trompeuses s’applique au CIF, même s’il n’est pas l’auteur de ces informations. Au conseiller donc d’utiliser, ou non, les informations promotionnelles, de les décrypter, d’en rectifier les erreurs ou approximations dans ses propres rapports écrits, ce qui semble ici avoir été le cas.
Des clients satisfaits, une relation professionnelle maintenue par la suite ?
L’AMF note bien l’absence de réclamations de la part des clients et la préservation de la relation d’affaire par la suite. Sans doute en tient-elle compte pour fixer le montant de la sanction. Elle tient surtout compte, à notre avis, de la prudence du conseiller sur ce type de produit, qu’il a proposé pour un montant mineur (mais non négligeable) au regard de l’encours global conseillé et sur une durée réduite, dix-huit mois.
En résumé
En résumé, le CIF a une obligation d’information : il doit mettre en œuvre une information précise et détaillée sur ses propositions, en particulier sur celles portant sur des placements privés et, plus généralement, sur toutes les structures qui ne sont pas des véhicules d’investissement gérés par des SGP agréées par l’AMF.
Le conseiller a aussi une obligation de mise en garde et doit mettre en œuvre une information objective centrée sur les risques. Prudence donc dans l’utilisation dans le rapport écrit de conseil de comparaisons avec d’autres produits, moins risqués ou plus connus des investisseurs (surtout si elles sont fausses !).
Enfin, le conseiller ne doit pas hésiter à ajouter des explications complémentaires sur le mécanisme de garantie de performance ou de liquidité (avec information sur le garant et sur sa capacité à honorer ses engagements) ; sur la faculté de l’investisseur à exercer ces garanties et sous quelles conditions ; sur le mécanisme de production du rendement et de la performance du produit ; sur le sous-jacent économique aux opérations ; sur les parties prenantes au montage etc. C’est le devoir de conseil.
Sources :
Sanction AMF du 20 mai 2015
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