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La liquidité … et l’illusion de la liquidité

Vincent Boisseau • mars 28, 0215
Dans sa dernière livraison trimestrielle, la Banque des Réglements Internationaux (BRI / BIS) s’intéresse à la liquidité sur les marchés obligataires internationaux et met en garde les acteurs de ces marchés, y compris les gérants d’actifs, contre ce qu’elle appelle …

l’illusion de la liquidité.

La BRI rappelle d’abord ce que signifie la liquidité sur un marché financier, soit la possibilité, pour des investisseurs, d’acheter ou de vendre des actifs financiers, sans délai ou presque, à un prix proche du prix de marché du moment et à un coût réduit. La BRI rappelle que la plupart du temps, sur les marchés obligataires, la liquidité est fournie par des teneurs de marché (les ‘‘market makers’’), qui, soit en intermédiation, soit en principal, répondent aux déséquilibres temporaires entre l’offre et la demande de titres obligataires en se portant contrepartie des investisseurs ‘‘finaux’’.

Or, la BRI constate que sous l’effet de causes conjoncturelles (baisse de l’appétit au risque des grandes banques pour ce type de marché, augmentation des émissions obligataires …) ou plus structurelles (la réglementation prudentielle et le coût en capital plus élevé de ce type d’activités), la liquidité des marchés obligataires évolue depuis quelques années. D’une part, en temps normal, la liquidité tend à se concentrer sur les souches obligataires les plus récentes (à l’émission), les plus importantes (en volume), les plus traitées (en fréquence). Se crée donc une dichotomie forte sur ce marché, ce que la BRI appelle ‘‘liquidity bifurcation’’. D’autre part, dans des conditions de marché plus difficiles, la volonté des ‘‘market makers’’ d’absorber les déséquilibres de marché importants peut diminuer fortement. En effet, ces grands acteurs privilégient, pour des raisons de risque / rendement, leurs clients les plus importants (qui génèrent d’autres flux de revenus par ailleurs) et l’activité de pure intermédiation, au détriment de l’activité de trading propriétaire au service, en un sens, de l’ensemble des acteurs du marché.

La BRI note par ailleurs que ces tendances apparaissent au moment où la demande pour la liquidité augmente du fait, par exemple, de la croissance des fonds d’investissements à liquidité quotidienne, ou encore de la concentration des acteurs de la gestion d’actifs, moins nombreux mais beaucoup plus gros. Dans des conditions de marché stressées, les déséquilibres entre offre et demande de titres obligataires (surtout ‘‘corporate’’) pourraient être immédiats et massifs, surtout compte tenu de la très grande sensibilité actuelle des investisseurs au niveau des taux d’intérêt.

Face à cette situation, le document ouvre plusieurs pistes de réflexion et d’action. Le développement du trading électronique est sans doute à même d’ouvrir le champ des acteurs, et donc des fournisseurs potentiels de liquidité. De même, une certaine uniformisation des souches obligataires peut améliorer les conditions de la liquidité par concentration des intérêts sur un nombre plus réduit d’émission.

Pour les gérants d’actifs, de plus en plus porteurs ultimes du risque de liquidité, les auteurs insistent sur l’importance des méthodes et outils de simulation du coût de la liquidité (stress tests, analyses par scénario) et sur la veille de marché (suivi de l’évolution des volumes traités, des spreads de cotation et des montants affichés sur la fourchette). Attention toutefois : une fourchette de cotation étroite ne signifie pas obligatoirement une bonne liquidité du titre. Elle peut aussi résulter d’une forte demande pour ce titre, dans un contexte de recherche permanente de rendement par les investisseurs. Aux investisseurs donc de mesurer et internaliser le risque de liquidité et de s’en prémunir.

Au niveau macro prudentiel, la BRI invite les acteurs de marché comme les autorités réglementaires à dissiper l’illusion de la liquidité, en reconsidérant le coût réel de la liquidité pour les premiers, et en préparant – au besoin – des mesures extrêmes de soutien à la liquidité (le ‘‘market making en dernier ressort’’) pour les seconds.

Pour en savoir plus …

Shifting tides – market liquidity and market-making in fixed income instruments (BIS Quarterly Review – March 2015)

http://www.bis.org/publ/qtrpdf/r_qt1503i.htm
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